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Elle lisait les étiquettes avec curiosité, s’y intéressant, indifférente à elle-même.

Morphine ! Cela lui rappelait une maladie de son adolescence, un soir de souffrances affreuses, et puis on lui avait fait une piqûre de morphine. Ah ! la lourdeur incomparable et délicieuse ! On avait refusé une seconde piqûre, et alors, elle s’en souvenait, elle avait passé la nuit à appeler la morphine, doucement, mélodieusement, d’une voix amoureuse du pavot…

Mon Dieu, que tout cela était loin !

Elle prit ce flacon et l’aiguille qui était à côté. Dix centigrammes de morphine, c’était une dose qui tuait et ne faisait pas souffrir.

Elle entra dans sa chambre ; il y avait du feu et un petit sifflement bas et doux entre les deux bûches. Elle s’assit à sa table, emplit l’aiguille de poison, la reposa sur la table. Elle se dit :

« Tout à l’heure, il faudra prendre cette aiguille, ne plus penser à rien qu’à la volonté de faire cela, et brusquement l’enfoncer dans la chair. »

Et puis, l’esprit rassuré, elle chercha des enveloppes, du papier. Elle prépara deux enveloppes :