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sourire suspendu et retenu, ces coins de bouche énigmatiques que lui donnaient les longs plaisirs de la mémoire, et que Pierre, autrefois, comparait aux troubles sourires des Vinci, qui continuent de goûter sur leurs propres lèvres les demeurantes saveurs des voluptés…

Elle mesurait à ce vertige ce que serait la joie du retour, et elle adoucissait ainsi le temps présent. Mais parfois Philippe recevait d’elle des pages criantes où s’était engouffrée sa merveilleuse possibilité de désir.

Philippe jouissait admirablement de ce caractère toujours s’égouttant et toujours empli, où le plaisir et la plainte, la déception, l’espoir, la fièvre, la fatigue et le découragement avaient le même poids de sang et de vie.

Au moment plus sage et plus prudent de son âge, savamment passionné de labeur, Philippe Forbier plein de délire et pourtant enclin à la sécurité, observait chez Sabine, avec une certitude qui le rassurait, cette aisance qu’elle avait à manier le désespoir, à précipiter et à écarter ses ténèbres ; elle sortait, des larmes, plus apte à vivre. Ses tristesses