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aimé Jérôme, et qu’en ce temps-là les jours étaient autour d’elle comme autour d’une petite fille, tout en jardins frais et en cris puérils. Elle ne se rappelait plus combien elle avait souffert, il lui apparaissait que cet amour avait été sa jeunesse, que la douleur même y avait eu le glissement et la force légère des colères d’enfant.

Elle connaissait de plus sombres tourments.

Ce garçon qu’elle avait aimé lui était maintenant si indifférent, si doucement indifférent, qu’elle éprouvait pour lui de l’amitié nette et droite, qu’elle avait difficilement avec les hommes. Elle se réjouissait de sentir Marie heureuse.

Un peu fatiguée, couchée de bonne heure après le dîner, Sabine réfléchissait. L’air de sa chambre était pur et vif.

Elle pensa que, dans les frais dortoirs, les religieuses qui font vœu d’ordre et de chasteté devaient avoir de telles soirées blanches, sans frisson et sans ferment. Elle s’endormit dans une paix qui ne lui était pas coutumière, ayant laissé tomber la vie autour d’elle comme un vêtement défait…