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ai tous les jours une lettre qui m’appelle, dont la douceur me fait mal.

— Alors, pourquoi n’êtes-vous pas parti, pourquoi ne partez-vous pas ?

— J’attends, soupira-t-il, que tu me dises de partir. J’aime mieux mourir et voir les autres malheureux que de te faire du mal à loi. Quoique tu sois plus forte que presque toutes les femmes, et qu’aucun être n’ait la vie et le rire comme toi, tu m’as trop parlé de tes fatigues et de tes chagrins, cela m’a rendu affreusement lâche et peureux avec toi. Quand tu me diras que tu veux bien que je m’en aille un peu là-bas, voir ce qu’ils font, pour si peu de temps, pour un mois seulement, pendant lequel je t’écrirai tous les jours, j’irai.

— C’est vous, répondit Sabine lentement, qui me demandez cela ! Il faut que moi je vous dise de vous en aller !… Elle attachait sur Philippe des yeux si lisibles et si nus qu’ils semblaient écorchés, avoir perdu la robe lisse du regard. Il s’impatienta :

— Je ne vous en parlais pas, j’étais préoccupé et j’agissais mal, voilà tout.