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— Comment serait-ce toi qui souffrirais puisque je t’adore, qu’à vingt ans même je n’eusse pu aimer que toi, et que tu es la fin divine de ma vie…

De retour chez elle, Sabine passait des soirées voluptueuses.

Par instants, Henri, Pierre, Jérôme, Marie lui semblaient soudain éclairés d’un contentement singulier.

— C’est parce que je l’ai vu… pensait-elle, je rapporte quelque chose de lui sur moi, et c’est cela qui, sans qu’ils le sachent, les rend heureux.

Elle attribuait à Philippe Forbier une puissance mystérieuse.

Elle obligeait Jérôme à jouer au piano la mort d’Iseult ; elle se jetait sur le canapé, s’y tenait de côté, les genoux ramassés contre elle, les bras fermés ; elle semblait souffrir, comme si elle se blessait à serrer la forme dure de son rêve.

Tout son être se creusait d’un désir infini. Elle aspirait le souvenir des baisers de Philippe ainsi qu’une admirable boisson acide et glacée. Par moments la musique trop forte la tuait ;