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air de dire à la suite de ce qu’elle énonçait : « Je vous jure que c’est ainsi » ; elle prononçait : « Cela est vrai… » sur le ton dont elle aurait crié :

« J’ai soif », avec une assurance puisée au lieu même de la certitude physique et du besoin.

Elle eut seize ans ; ce fut une vivace année ; elle dominait autour d’elle M. de Rozée, faible et courtois devant la croissance féminine, et sa gouvernante qui avait un sens si respectueux de l’ordre social, qu’elle considérait maintenant avec déférence cette jeune fille de race noble, qu’elle avait élevée.

Des amis de son père, leurs fils, quelques jeunes filles de son âge venaient à leur maison à Paris, les rejoignaient en été au château que M. de Rozée possédait en Touraine.

Sabine goûtait les plaisirs de l’air, des jeux ; elle éprouvait, avec un cœur affermi, qu’un plus robuste sentiment de la vie diminuait en elle la langueur et la mélancolie qui avaient accablé son enfance, l’avait retenue oppressée devant les violets du crépuscule, l’odeur molle des pétunias, le vent de l’automne dans les cheminées, le brusque cri de l’hirondelle.