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se rappelait son enfance ardente et volontaire, son cœur de petite fille énergique et brûlant, auquel elle pensait maintenant avec surprise et ignorance, comme une enfant qui se souviendrait d’avoir été une femme passionnée.

Elle était âgée de sept ans quand sa mère mourut, et quoiqu’elle l’eût rarement vue tout près d’elle, elle l’avait regrettée désespérément, de toute son âme précoce et pleine, à qui le deuil donnait déjà le sentiment du terrible, du particulier et de la honte.

Elle n’avait pas pu manger pendant plusieurs jours, et elle avait considéré cela avec cette stupeur muette et sage des enfants, qui ne s’expliquent pas quelle force en eux refuse déjà de vivre.

Sensible jusqu’au trouble de l’esprit et jusqu’au malaise physique, elle grandit près de son père, M. de Rozée, dont l’indulgence indifférente et brusque, le caractère amer, l’intelligence fine et compliquée lui inspiraient une admiration sans tendresse.

Étonnante enfance mystique et amoureuse, désespérée, sage et violente !

Nul couvent n’est plus soumis aux disciplines