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de sa joie étaient affaiblis – mais la tranquillité et le confort de s’être attaché l’amitié de cet homme. Pierre restait très à l’aise avec Henri. Le trouble qu’il sentait naître en lui à l’égard de la femme de son ami grandissait dans la confusion, et à la faveur de cette confusion il ne s’expliquait rien. Il s’occupait au premier plan de son esprit, où était la curiosité ; il ne pénétrait point dans les régions plus profondes de lui-même où était l’ombre.

Par moments, quelques silences, rares chez lui, pesaient, et il apparaissait harassé dans ces instants-là, privé de ses forces et de son intelligence.

Sabine, que cette intimité mystérieuse amusait, se faisait quelquefois des reproches. Elle se disait que ce n’était pas bien à elle d’avoir mené son ami à cette tendresse où elle ne pourrait pas le suivre, que c’était le gaspillage des plus hautes forces du cœur, et qui pouvait savoir jusqu’à quelle détresse irait la violence de cet être chez qui la passion était obscure ? Pourtant la bonté de Pierre la rassurait.