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, sur le papier de riz d’un ton d’ivoire, les nuages qui représentaient un ciel du soir étaient comme une fumée de cigarette ; elle regardait cela avec pitié et douceur comme si cette image lui était devenue fraternelle d’avoir assisté à toute l’horreur qu’elle venait de vivre…

Quelque chose dans son être était si cassé, si rompu en deux, qu’elle pensait avoir le corps brisé aussi, ne plus pouvoir marcher si elle essayait de se lever. Et, par besoin de ne plus voir ce qu’elle voyait, elle se leva, fit quelques pas. Ces seuls mouvements dressèrent en elle sa pensée qui se mit à revivre avec une musculature terrible.

Elle sentit cela, en eut une peur affreuse. Elle se prit la tête, ses mains retombaient et remontaient à son front, elle disait à haute voix :

— Il faut avoir du courage, du courage…

Des souvenirs lui arrivaient, souvenirs de la voix, du regard de cet homme, souvenirs qui bondissaient en elle comme des lions et, imprimant à son être les mouvements de son âme, la jetaient de côté, écrasée, les deux mains collées à la muraille.

Elle disait encore : « Il faut tuer cela, tuer cela… »