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Tout est dans le poète ; il s’ajoute lui-même
Aux siècles, aux trésors, aux nations, aux lois.
L’univers languissant refleurit dès qu’il aime.
Il est fort en son cœur, et pourtant il essaime,
Étant lui seul autour de soi !

Il a tant absorbé et contenu l’espace
Que, dans sa marche ferme et sa simplicité,
Il transporte le monde alors qu’il se déplace.
On voit sur lui des flots, des astres, des cités,
On entend quand il songe, on entend quand il passe,
Se détendre l’immensité.

— Le voici donc, pareil à sa forte Angleterre,
À l’île de vigueur debout sur l’eau d’argent,
Celui qui, d’un élan natif et volontaire,
Joint au Nord obstiné l’Orient des mystères,
À la fois actif et songeant.

Si noble que l’idée ait rendu son visage,
Le ténébreux instinct parfois l’ensevelit,
Il est tout recouvert de brillants paysages,
Il ressemble au destin, il ressemble au voyage,
Et les parcours sont abolis.