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la maréchale de guébriant durant son veuvage

de bonne heure au couvent de Faremoutiers[1]. Leur mère, Catherine de Lorraine, étant morte depuis quelques années déjà, Charles de Mantoue confiait le soin de développer l’esprit et le cœur de ses deux filles cadettes à celle dont Bossuet dira : « la vénérable mère Françoise de la Châtre, d’heureuse et sainte mémoire, abbesse de Faremoustier, que nous pouvons appeler la restauratrice de la règle de saint Benoît et la lumière de la vie monastique[2] ». À Françoise de la Châtre il était recommandé de ne rien négliger pour inspirer aux jeunes princesses le goût du couvent. Dans la solitude de Sainte-Fare, ajoutera l’évêque de Meaux, « où les joies de la terre étaient inconnues, où les vestiges des hommes du monde, des curieux et des vagabonds ne paraissaient pas, sous la conduite de la sainte abbesse… les commencements de la princesse Anne étaient heureux… Elle aimait tout dans la vie religieuse jusqu’à ses austérités et ses humiliations ». Pendant un séjour de douze années, modèle de sagesse et de modestie, elle donnait les plus belles espérances.

Selon la coutume établie dans les grandes Maisons, l’avenir des deux cadettes devait être sacrifié à celui de leur ainée et à l’agrandissement de sa fortune. La pression que l’on exerça sur l’une d’elles produisit l’effet contraire[3]. « La princesse Bénédicte, dit encore Bossuet, la plus jeune des trois sœurs, fut la première immolée à ces intérêts de famille ; on la fit abbesse, sans que dans un âge si tendre elle sût ce qu’elle faisait, et la marque d’une si grave dignité fut comme un jouet entre ses mains ». Abbesse d’Avenay, Bénédicte, « malgré une vocation si

  1. Faremoutiers, non loin de Coulommiers.
  2. Oraison funèbre d’Anne de Gonzague de Clèves, princesse palatine.
  3. Des mémoires, parus en 1786 sous le titre de : Mémoires d’Anne de Gonzague, princesse palatine, furent tout d’abord attribués à diverses personnes, puis finalement on sut qu’ils étaient l’œuvre de M. Gabriel Senac de Meilhan, ancien intendant du Hainaut. « Cet ouvrage d’abord, dit la Biographie Universelle de Michaud, et ensuite la question de savoir s’il était authentique, occupèrent beaucoup le public. Il parut, à ce sujet, des articles très bien faits et plusieurs lettres dans le Journal de Paris. Bientôt il fut prouvé que ce n’était qu’une imitation très habile et très piquante, un jeu d’esprit plus curieux qu’utile. »
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