Page:Noailles - Épisodes de la guerre de Trente ans. Le maréchal de Guébriant, 1913.djvu/456

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
428
le maréchal de guébriant

trois fois essaya-t-elle de le réduire en cendres. « L’âge, ajoute le mémoire, corrigea un peu cette humeur désespérée[1]. »

En 1695, la marquise de Rosmadec, âgée de 67 ans, usée avant l’âge par une vie troublée, était très malade. L’apothicaire qui la soignait lui donna, par erreur, une si forte dose d’opium qu’il la tua. Le mémoire que nous utilisons ajoute : « Ainsi finit dame Renée Budes, née avec beaucoup de biens et de qualités, qui a trouvé le moyen de ruiner sa maison et celle de son mari. » Des deux fils qu’elle laissait, l’un mourut quelques semaines plus tard, l’autre lui survécut cinq ans.

Vers le milieu du dix-septième siècle, la famille du maréchal risquait de s’éteindre. La branche du Hirel allait finir avec la marquise de Rosmadec ; celle de Blanchelande, avec le prieur de Saint-James et la marquise de Courvaudon ; celle du Tertre-Jouan, dans la personne d’Anne-Marie Budes, lorsqu’après un veuvage prolongé, le seigneur de Blanchelande résolut de contracter, en 1653, avec Françoise de Rosmar, un second mariage, qui perpétua une lignée déjà longue de guerriers pleins d’honneur et de race.

Permettons-nous une digression pour conter la singulière histoire d’Anne-Marie Budes du Tertre-Jouan, que nous venons de citer. Bien que très pieuse, elle n’était pas hostile à l’idée de mariage. Comme elle jouissait d’une belle fortune, on l’appelait « la grande héritière de Bretagne ». Douée d’une intelligence vive, d’un charme extrême en sa personne et dans sa conversation, « extraordinairement bien faite », raconte-t-on, elle attira de nombreux prétendants. Mais alors que d’étrangetés ! Un jour, au moment d’une première entrevue matrimoniale avec un seigneur ayant charge à la Cour, une affreuse tumeur, de la grosseur d’un œuf, surgissant à l’œil, la défigure tout à coup, au point que le jeune homme s’éclipse. Une autre fois, aux eaux de Forges, un gentilhomme la distingue. Elle veut lui

  1. Archives Guébriant.