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NOA NOA

le soir

Voici le Soir qui vient dans la pourpre et l’or, ivre
D’amour. C’est l’heure fraiche ou se reprend à vivre
Le peuple enfant, joyeux d’un avenir de nuit.

Et toute l’Île, sur les rivages, au bruit
Du vivo, des chansons, des rires assemblée,
S’agite, folle, bavarde, bariolée, —
Les femmes, le tiaré à l’oreille, les plis
Du paréo tendus sur leurs reins assouplis,
Le torse libre, aux tons de bronze et de bitume, —
Et la mourante ardeur du couchant se rallume
Aux : brusques éclairs d’or qui sillonnent leur chair.

Le vent de l’éternel été s’endort dans l’air
Vespéral. Le soleil, vieilli, vaincu, recule
Devant la jeune lune au bord du crépuscule
Se dressant, radieuse, et leurs feux, un moment,
Sur la crête des flots qui dansent, mollement