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Nous dépassâmes donc le Trou aux Thons, et un homme fut désigné par le patron des pirogues pour enfoncer la perche dans la mer et jeter Phameeon.

On attendit, de longues minutes durant. Aucun thon ne venait mordre.

Ce fut le tour d’un autre rameur, et, cette fois, un superbe thon mordit, fit ployer la perche. Quatre bras vigoureux soulevèrent l’arbuste en tirant les cordes à l’arrière, et le thon parut à la surface. Mais aussitôt un gros requin bondit sur les vagues : quelques coups des terribles dents, et nous n’avions plus, au croc de l’hameçon, qu’une tête coupée.

Le patron me fit signe. Je jetai l’hameçon.

Au bout de très peu de temps, nous pêchions un thon énorme. — J’entendis, sans trop y prendre garde, mes voisins rire entre eux et chuchoter. — Assommé à coups de bâton sur la tête, l’animal ; frémissant des spasmes de l’agonie, s’agitait dans la pirogue, et son corps, transformé en miroir brillanté de facettes, jetait les éclairs de mille feux.

Une seconde fois, je fus aussi heureux.

Décidément, le Français portait chance ! Mes compagnons me félicitaient joyeusement, protestant que j’étais un homme de bien, et moi, tout glorieux, je ne disais pas non.

Mais, dans le concert des louanges, je distinguai, comme