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cessé, on place le roi sur le lit sacre où, tout à l’heure, était l’idole, et on reprend le chemin du maraë, à peu près dans le même ordre processionnel qu’on a observé pour en venir.

Les prêtres portent l’idole. Les chefs portent le roi. Les prêtres ouvrent la marche avec leur musique et leur danse.

Le peuple vient derrière. Mais maintenant, s’abandonnant à sa joie, il ne cesse de crier :

— Maëva Arii !

L’idole est solennellement rétablie sur l’autel.

Ici se termine la tête religieuse. La fête populaire va commencer.

Comme il a communié avec les Dieux dans leur temple, comme il a communié avec la nature dans la mer, le roi va communier avec son peuple[1]. — Le roi, couché sur des nettes, va recevoir le dernier hommage du peuple.

Hommage frénétique ; d’un peuple sauvage.

C’est toute une foule exprimant son amour pour un homme, et cet homme est le roi. C’est le dialogue, grandiose jusqu’à l’horreur et jusqu’à l’épouvante, d’un homme et de la foule.

  1. Il est a craindre que les missionnaires (qui nous ont conservé ces traditions) aient légèrement, dans un but qu’on devine, calomnié sur ce point comme sur tant d’autres les ancêtres de leurs ouailles. Mais, à travers ce qu’il a de brutal, de grotesque et même de répugnant, on conviendra peut-être que ce rite suprême ne manque pu d’une singulière beauté.