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saisir, elle est loin, inaccessible, incommunicable, enveloppée de rire et de changement. Puis, quand elle veut, elle se rapproche, pour échapper encore dès qu’on lui laisse voir la moindre apparence de certitude. Et, pendant qu’intrigue de ses dehors vous cherchez sa vérité intime sans penser à jouer un personnage, elle vous examine avec une tranquille assurance, du fond de son perpétuel rire et de cette insouciante légèreté, moins réelle qu’apparente, peut-être.

Pour mon compte, je renonçai tôt à des calculs qui m’empèchaient de jouir de ma vie. Je me laissai vivre, simplement, attendant de la suite des jours, avec confiance, les révélations que les premiers instants me refusaient.

Une semaine s’écoula ainsi, pendant laquelle je fus d’une « enfance » qui m’était à moi-même inconnue.

J’aimais Téhura et je le lui disais, ce qui la faisait rire : elle le savait bien !

Elle semblait, en retour, m’aimer, et ne me le disait point : — mais quelquefois, la nuit, des éclairs sillonnaient l’or de la peau de Téhura…

Le huitième jour — il me semblait que nous venions d’entrer pour la première fois ensemble dans ma case — Téhura me demanda la permission d’aller voir sa mère, à Faoné. Chose promise.