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NOA NOA

Voici. — Par groupes et par couples, librement,
Groupes rieurs, couples graves, d’amis, d’amants,
Foulant de pas égaux et lents l’herbe odorante,
Ils vont, loyers vivants de lumière vibrante,
Et fastueusement vêtus de seul soleil,
À la source, qui rit son frais rire vermeil
Et s’enivre d’être claire comme la joie,
Baigner leurs corps où l’or pourpre du sang flamboie.

Et l’aurore médite au front du Dieu pensif,
Solidement assis dans son orgueil massif,
Majestueux monceau de siècles et de pierres
Qui dresse à l’horizon son horreur familière
Pour rappeler à l’homme aisément oublieux
Qu’il se souvienne de faire leur part aux Dieux
Et leur offre à cueillir la fleur de son extase.’
Car cette ardeur inextinguible qui l’embrase
Lui vient d’eux et vers eux : doit retrouver son cours
Selon la loi de bienfaisante parabole
Qui régit les destins, les amours et les jours.
Ainsi l’aurore sur le front dur de l’idole