Page:Noël - Fin de vie (notes et souvenirs).djvu/11

Cette page a été validée par deux contributeurs.

par les rides de ses joues ; mais, dans le groupe d’amis, il était le plus gai, le plus dispos, l’homme de l’espérance ailée. Pour combien de prétendus jeunes, la fin de sa vie si aimable, si joyeuse et si entraînante, eût été un beau commencement !

Nourri de la moelle des lions, Noel pouvait tenir en mépris ce qui fait l’orgueil et la jactance de tant d’autres pauvres humains : il ne fut « ni député ni décoré ». Et combien de gens plus célèbres que lui ne sauraient en dire autant ! Il put se qualifier vaillamment d’ignare, parce qu’il planait au-dessus des ruses et des platitudes qui mènent au succès. Il osa rédiger les Mémoires d’un Imbécile, tout en se rendant au fond le bon témoignage que son imbécillité n’était pas éloignée de la haute sagesse, qu’elle était sœur de cette naïveté sans laquelle il n’y a ni progrès ni bonté dans le monde. Nommé bibliothécaire, il sut mépriser le fatras des bouquins, pour rester attaché aux quelques œuvres, si peu nombreuses, dans lesquelles est enfermé le trésor de la pensée humaine. Obligé par les nécessités de la vie à se faire journaliste, il devint l’honnête Jean Labêche,