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Nous réclamons une situation nette. Comme les nouveaux venus à la Philosophie vivent encore parmi les hommes, il leur appartient de mesurer les conséquences de la Philosophie.


VII


Les philosophies inventées par les bourgeois au pouvoir sont des philosophies de la pauvreté. Elles conviennent aux oppresseurs. Mais la Loi de la Philosophie n’est pas la défense de la liberté et de la richesse humaines, cette loi n’existe pas et il n’y pas de raison dialectique, de preuves capables de contraindre une philosophie à prendre cette défense en tant que Philosophie. Pas de nécessité intrinsèque. Mais seulement des volontés extrinsèques. Il n’est pas intrinsèquement absurde que la Philosophie préfère la pauvreté à la richesse : aucun outrage ne saurait offenser la raison, cette rêveuse machine. Mais en fait il existe des hommes qui veulent la richesse : ils n’ont ni les moyens ni le désir de démontrer aux philosophes de ce temps qu’ils sont intrinsèquement faux, que leurs philosophies sont contradictoires avec la Philosophie. Mais ils donnent leurs huit jours aux philosophes qui sont faux, non au regard de la philosophie, mais de l’homme, aux philosophes dont l’erreur n’est pas une défaillance technique intérieure à la Philosophie, mais une erreur contre l’histoire des hommes. On en vient toujours à la grossière idée des Amis de la Terre qui jugent par les conséquences et non par les principes.

Comme il n’existe ni destination éternelle de la philosophie, ni arbitre surhumain de la Philosophie, voici la situation philosophique où nous sommes : il y a des penseurs qui s’accommodent de l’esclavage présent de la plus grande partie de l’humanité, et il y a déjà quelques hommes qui n’aimant pas cet esclavage entre-