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terribles de la mort. Appuyé sur un large coussin de velours et de dentelles, M. de Sauvetat semblait dormir.

M. Drieux tressaillit malgré lui.

— Mais cet homme n’est pas mort ! ne put-il s’empêcher de s’écrier.

M. de Boutin ne répondit pas.

Placé au pied du cercueil, la main appuyée sur le bord étroit de la bière, il regardait avec une indéfinissable et profonde expression les restes de celui qui avait été son ami.

Deux larmes, qu’il ne songea pas à essuyer, roulèrent silencieuses et lentes, sur les joues de l’austère magistrat.

M. Despax, insensible en apparence à ce spectacle tout empreint d’une sombre majesté, tirait de sa trousse les instruments nécessaires à l’autopsie.

M. Gaste réfléchissait ; les veines gonflées de son large front trahissaient une préoccupation intense ; sa figure franche et loyale s’était péniblement assombrie.

— Eh bien, demanda M. Despax, sommes-nous prêts ?

M. Gaste parut se réveiller en sursaut ; un frisson le secoua ; il sembla faire un effort sur lui-même, puis se retournant vers le docteur :

— Quand vous voudrez, répondit-il.

Et tout aussitôt, joignant l’action à la parole, il enleva le couvre-pieds de satin qui recouvrait entièrement le corps de M. de Sauvetat.

À ce moment, le docteur saisit convulsivement le bras du chimiste.

— Voyez ! voyez ! exclama-t-il.

Et il montrait un liquide brun et noirâtre, remplissant le fond du cercueil et surnageant même autour du mort.