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certitude était bien plutôt chez moi une intuition qu’une réalité, et qu’il m’était interdit de la formuler catégoriquement par un acte d’accusation.

D’un autre côté, les grandes preuves que j’espérais découvrir ici étaient absentes, absentes comme le corps des soupçons sans lequel je ne pouvais préciser ma pensée.

Je dus me taire pour garder mes moyens d’agir. Mais le jour de la condamnation de Marianne, de cette condamnation que je n’avais pu empêcher, je jurai d’en faire appel. Aussi, comptant sur le temps et ma volonté, j’ai attendu d’eux ces preuves que je n’avais pu alors découvrir.

Blanche voulut payer d’audace devant ceux qui l’entouraient :

— Et aujourd’hui, interrogea-t-elle, vous les avez sans doute, ces preuves ?

— Oui, Madame, nous avons au grand complet toutes celles qui sont nécessaires ; nous les avons irrécusables et flagrantes, et je vous accuse, vous Blanche d’Auvray, d’avoir empoisonné Lucien de Sauvetat, votre premier mari.

En même temps M. Dufour-Lafeuillade, qui avait laissé parler le juge sans l’interrompre, s’approcha de madame Larroche :

— Au nom de la loi, dit-il, je vous arrête.

Il lui mit la main sur l’épaule.

À ce contact, Blanche poussa un cri rauque qui ressemblait à un hurlement :

— Oh ! mais vous êtes tous fous ! s’écria-t-elle en se débattant l’écume aux lèvres ; la justice a parlé une fois, elle a proclamé mon innocence : est-ce qu’on revient sur ses arrêts ? Laissez-moi !… laissez-moi !…