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envahissante sur la vallée dépeuplée, au milieu de ce silence plein de douleurs et de larmes, on entendit tout à coup une explosion épouvantable de bruit d’armes, de hurlements indistincts mêlés aux cris plus faibles des femmes et des enfants qu’on égorgeait.

Hélas ! la guerre ! Quelles atrocités, quelles infamies n’entraîne-t-elle pas avec elle !…

C’était une bande de soldats étrangers, maraudeurs pour la plupart, qui avaient quitté le champ de bataille et, au hasard, avaient gravi les premiers escarpements de la montagne.

La petite troupe des Beni-Muzza leur avait tenu tête un instant, malgré leur courage et leur dévouement, ils avaient été écrasés par le nombre ; vaillamment ils étaient tombés jusqu’au dernier dans les gorges qu’ils s’étaient chargés de défendre.

Les maraudeurs, exaspérés de cette résistance inattendue, devinèrent derrière ce rempart vivant une proie bonne à prendre.

Comme des chacals alléchés par l’odeur du sang, ils se dirigèrent vers la tribu, massacrant tout ce qui se trouvait sur leur passage.

— Grâce ! criaient les femmes éperdues ; grâce !…

— Où est la demeure du chef ? demandèrent-ils dans un accent bizarre qui n’était ni l’arabe ni le français, et que nul ne comprit.

On ne la leur montra pas, mais ils la reconnurent à ses proportions, aux jardins qui l’entouraient, aux richesses qu’elle semblait contenir.

Chériffa, au bruit de cet indescriptible tumulte, avait rassemblé tous ses serviteurs autour d’elle ; et, debout, dans la pièce où Muzza avait rendu le dernier soupir, elle essayait de remonter le courage des siens.