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— Elle a beaucoup souffert, dit-il au bout de quelques minutes ; mais si vous saviez quel culte et quel amour au-dessus de toute atteinte elle vous a conservé jusqu’au dernier moment !

Je l’ai soignée à votre place ; j’ai été sans vous au chevet de son lit de mort, ajouta-t-il pour apporter une diversion à son chagrin, mais je serai avec vous pour la venger.

Marianne, à ces mots, se calma presque subitement ; Jacques ne s’était pas trompé : dans ses yeux, l’énergie et la volonté séchaient les pleurs. Chez cette nature si admirablement trempée, le désespoir ne pouvait garder longtemps les apparences de la faiblesse ou de l’impuissance.

— Vous êtes homme d’honneur, dit-elle, vous allez tout me raconter, scrupuleusement ; je vous le demande. Par tout ce que vous avez de cher et de sacré au monde, n’oubliez rien, n’exagérez rien. Il faut que je sache quelle vengeance réclament ceux que je n’ai pu sauver !… Au nom de la justice et de la vérité, parlez ! Quelle a été la conduite de madame de Sauvetat ? Qu’a-t-elle fait, qu’est-elle devenue, depuis que je suis partie ?

— D’abord, répondit Jacques, cessez d’appeler de ce nom de Sauvetat celle qui n’était pas digne de le porter. Il y a déjà longtemps qu’elle l’a échangé contre un autre.

La détenue étouffa un étrange cri de surprise, presque de joie.

— Elle s’est remariée ? interrogea-t-elle anxieuse.

— Oui.

— Avec qui ?

— Avec Georges Larroche.

Marianne se leva toute droite, l’œil brillant ; sur sa