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enivrée de sa présence, ouvrait son cœur, malgré elle, à son rêve d’amour.

Mais en descendant au fond de son âme, elle s’en voulait de ce sentiment qui lui semblait la profanation de son récent malheur ; et, silencieuse, elle pleurait.

Tout à coup, une voix doucement affectueuse l’éveilla sa méditation.

— Souffrez-vous davantage ? lui demanda-t-elle.

En même temps, la personne qui lui parlait saisit sa main qui pendait inerte le long du fauteuil où elle était étendue, et la serra légèrement.

Elle leva les yeux et étouffa un cri pendant qu’une rougeur charmante, toute pleine de mystérieux aveux, couvrait ses joues.

Georges était près d’elle.

Embarrassée, elle retira sa main.

— Merci, murmura-t-elle tout bas, je ne souffre pas ; mais hélas ! je pense et je me souviens !… Je ne reverrai plus ceux qui m’aimaient.

La voix du jeune homme devint encore plus tendre :

— Vous êtes injuste, Marguerite, dit-il ; de grandes et légitimes affections ont, en effet, disparu de votre vie, mais elles ne vous ont pas toutes été enlevées. Ne remplissez-vous pas tout entière le cœur de votre mère ? Et d’autres liens ne viendront-ils pas, bientôt peut-être, vous attacher de plus près encore à ceux qui ne sont aujourd’hui que vos amis ?

En disant ces mots, il osa appuyer ses lèvres sur le front de l’enfant qui ne respirait plus.

Blanche arrivait ; elle avait entendu les dernières paroles de Georges, la jeune fille surprit sur ses lèvres, un sourire singulier.

Depuis ce jour, combien de fois Marguerite n’avait-elle pas vu sa mère attacher sur celui qu’elle regardait