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Elle s’avança lentement et salua avec sa grâce triste et froide. Ses grands yeux profonds brillaient d’un éclat extraordinaire. Ce que les lignes de son visage avaient de sévère et d’un peu trop grave était atténué par une expression de douleur sereine qui lui donnait un charme irrésistible.

Elle s’assit sur la sellette des accusés, et se dégantant, elle posa ses mains de neige sur le rebord de la banquette.

La lecture de l’acte d’accusation commença.

Elle l’écouta dans une pose qui n’indiquait ni l’anxiété, ni le découragement, ni la bravade, ni la terreur.

C’était le résumé de toutes les preuves accumulées par M. Drieux : la fiole trouvée dans le placard derrière le lit, les soi-disant relations existant entre le tuteur et sa pupille, enfin le legs de 50,000 francs, dernier mobile du crime, d’après le magistrat.

— L’accusée, dit le greffier en terminant, mise au courant des charges terribles relevées contre elle, n’est pas sortie de son mutisme obstiné. Elle n’a rien avoué c’est vrai, mais devant l’évidence elle n’a pas cherché à nier et son silence doit être regardé comme le plus sincère des aveux.

« En conséquence, la fille Marianne est accusée d’avoir volontairement et avec préméditation donné la mort par le poison, dans la dernière quinzaine de décembre 1863, à Joseph-Adhémar-Lucien de Sauvetat, crime prévu par les art. 296, 297, 301 et 302 du Code pénal. »

L’accusée, sans en attendre l’ordre, s’était levée. Sa beauté parut alors plus admirable que jamais.

— Vos noms et prénoms ? interrogea le président.

— Marianne.

— N’en avez-vous pas d’autres ?