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cause ; jamais je n’ai cherché à vous faire revenir sur votre résolution !

Non ! Vous vous apparteniez, Mademoiselle, vous étiez heureuse, ou vous en aviez l’air. Autour de vous il y avait l’estime de tous, les joies saintes de la famille ; je n’avais donc, moi, le plus dévoué de vos serviteurs, qu’à respecter votre volonté et espérer tout au plus que quelque jour vous auriez pitié.

Aujourd’hui, comme alors, sans plus d’explications, vous me repoussez encore ; mais cette fois je ne vous obéis plus ; je dois rester, rester, quand bien même votre haine devrait, me récompenser de ma persévérance ; oui, je dois rester et vous sauver ! Le contraire serait une lâcheté, Mademoiselle, et Jacques Descat se fera tuer avant d’en commettre une seule.

Il s’était levé en prononçant ces dernières paroles, et haletant, bouleversé, parcourait l’étroite cellule.

Elle avait caché son front dans ses mains, les sanglots soulevaient sa poitrine, des larmes brûlantes passaient entre ses doigts effilés et retombaient une à une sur la table grossière où son coude, s’appuyait.

Tout à coup, Jacques s’arrêta et la contempla en silence. Devant cette attitude brisée, devant ce désespoir qu’une volonté supérieure contenait à peine, la flamme de son regard s’éteignit, l’expression amère et sarcastique de ses traits fit place à une douleur poignante, et venant tomber aux pieds de Marianne :

— Je suis fou, n’est-ce pas, lui demanda-t-il, je ne sais plus ni voir, ni entendre ? C’est une épreuve que vous m’infligez ; vous avez voulu savoir si moi aussi, je douterais de vous ? Est-ce que c’est possible !

Et comme elle se taisait toujours, il poursuivit :

— Marianne, ne me désespérez pas ! Vous savez bien