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manité tout entière n’a pas rivalisé d’ardeur pour acquérir la sagesse, et n’introduit pas le jeune homme de la manière la plus sage dans la vie et dans la science. Comment serait-il donc possible de supporter le sentiment de cette triple insuffisance si l’on n’était pas capable de découvrir un sens sublime dans la nécessité d’aspirer, de combattre, de succomber ; si l’on n’apprenait de la tragédie à prendre plaisir au rhythme grandiose et à la victime de la passion. L’art, à la vérité, n’est pas un gouverneur pour notre conduite immédiate ; l’artiste n’est jamais en ce sens un gouverneur ou un conseiller. Les objets auxquels aspirent les héros tragiques ne sont pas indistinctement en eux-mêmes les buts les plus dignes d’aspiration. Aussi longtemps que nous nous trouvons sous le charme de l’art, notre appréciation des choses est altérée comme dans un rêve. Ce que nous trouvons, tant que dure cet