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puissance partielle ou complète à les satisfaire, se changeait pour lui en aiguillon douloureux ; excitée par des privations continuelles, son imagination s’égarait dans des excès lorsque celles-ci venaient à cesser. Sa vie devenait de plus en plus compliquée, mais les moyens, les expédients qu’il découvrait dans son art étaient aussi de plus en plus hardis et fertiles en inventions, tout en n’étant au fond que des pis-aller dramatiques, des motifs mis en avant qui trompent un moment et ne sont inventés que pour un moment. Ils sont en un clin d’œil à sa portée et tout aussi vite usés. Envisagée de près et sans affection, la vie de Wagner, pour rappeler une pensée de Schopenhauer, tient beaucoup de la comédie et même d’une comédie singulièrement grotesque. Quel effet devait produire durant certaines périodes la conscience d’un grotesque manque de dignité de sa vie sur le sentiment de l’artiste qui, plus qu’aucun