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PAR DELÀ LE BIEN ET LE MAL

grand « péché contre l’esprit » que l’Europe littéraire ait sur la conscience.

53.

Pourquoi aujourd’hui de l’athéisme ? — Le « père » en Dieu est foncièrement réfuté, de même le « juge », le « dispensateur ». De même son « libre arbitre » : il n’entend pas, et, s’il entendait, il ne saurait pourtant pas venir en aide. Ce qu’il y a de pire c’est qu’il paraît incapable de se communiquer clairement. Est-il obscur ? — Voilà ce que j’ai recueilli de plusieurs entretiens pris à droite et à gauche, en questionnant, en écoutant çà et là, au sujet de la ruine du théisme européen et de sa cause. Il me semble que l’instinct religieux, bien qu’il se développe puissamment, rejette le théisme avec une profonde méfiance.

54.

De quoi s’occupe en somme toute la philosophie moderne ? Depuis Descartes — et cela plutôt par défi contre lui qu’en s’appuyant sur ses affirmations — tous les philosophes commettent un attentat contre le vieux concept de l’âme, sous l’apparence d’une critique de la conception du sujet et de l’attribut, c’est-à-dire un attentat contre le postulat de la doctrine chrétienne. La philosophie moderne, en tant que théorie sceptique de la connaissance, est, soit d’une façon ouverte, soit