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PAR DELÀ LE BIEN ET LE MAL

12.

Pour ce qui en est de l’atomisme matérialiste, celui-ci appartient aux choses les mieux réfutées qui soient. Peut-être, parmi les savants, personne aujourd’hui, n’est-il assez ignorant pour lui accorder une importance quelconque, si ce n’est pour la commodité personnelle et l’usage courant (je veux dire pour abréger la terminologie) — grâce surtout à ce Polonais, Boscovich, qui fut, jusqu’à présent, avec un autre Polonais, Copernic, le plus grand et le plus victorieux adversaire de l’apparence. Tandis que Copernic nous a persuadés de croire, contrairement à l’affirmation de nos sens, que la terre n’est pas immobile, Boscovich enseigna à abjurer la croyance en la dernière chose qui passât pour « établie » sur la terre, la croyance en la « matière » et l’atome, dernière réduction de la terre. Ce fut le grand triomphe remporté jusque-là sur les sens. — Mais il faut aller plus loin, et déclarer aussi la guerre au « besoin atomique » qui survit encore de la façon la plus dangereuse, sur des domaines où personne ne le soupçonne, au même titre que ce fameux besoin métaphysique, et ce sera une guerre au couteau et sans merci. Il faudrait aussi, avant toute autre chose, donner le coup de grâce à cet autre atomisme, plus néfaste encore, l’atomisme des âmes que le christianisme a le mieux et le plus longtemps enseigné. Qu’il me