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CES ÂMES INCERTAINES…



Ces âmes incertaines,
Je leur en veux à mort.
Tout leur honneur est un supplice,
Leurs louanges couvrent de honte

Parce que, au bout de leur laisse,
Je ne traverse pas les temps,
Le poison de l’envie, doux et désespéré,
Dans leur regard me salue.

Qu’ils m’injurient avec courage
En me tournant le dos !
Ces yeux suppliants et égarés
Sans cesse se tromperont sur moi.



UN FOU AU DÉSESPOIR



Hélas ! ce que j’ai écrit sur la table et le mur
Avec mon cœur de fou et ma main de fou
Devrait orner pour moi la table et le mur…

Mais vous dites : « Les mains de fou gribouillent, —
Et il faut nettoyer la table et le mur
Jusqu’à ce que la dernière trace ait disparu ! »

Permettez ! Je vais vous donner un coup de main —,
J’ai appris à me servir de l’éponge et du balai,
Comme critique et comme homme de peine.

Mais lorsque le travail sera fini,
J’aimerais bien vous voir, grands sages que vous êtes,
Souiller de votre sagesse la table et le mur.