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ment un petit hasard, conformément à quoi cette quantité se « dégage » maintenant d’une façon unique et déterminée : c’est le rapport de l’allumette au baril de poudre. Je compte parmi ces petits hasards et ces allumettes tout ce que l’on nomme « causes » et davantage encore tout ce que l’on nomme « vocations » : elles sont relativement quelconques, arbitraires, presque indifféren­tes, comparées à cette énorme quantité de force qui tend, comme je l’ai indiqué, à être utilisée d’une façon quel­conque. On considère généralement la chose d’une autre façon : on est habitué à voir la force active dans le but (la fin, la vocation, etc.), conformément à une erreur an­cienne, — mais le but n’est que la force dirigeante, on a confondu le pilote avec la vapeur. Et ce n’est quelquefois pas même la force dirigeante, le pilote… Le « but » et l’« intention » ne sont-ils pas très souvent des prétextes enjoliveurs, un aveuglement volontaire de la vanité qui ne veut pas admettre que le vaisseau suit le courant où il est entré par hasard ? qu’il veut suivre telle direction parce qu’il faut qu’il la suive ? qu’il a bien une direction, mais, en aucune façon, un pilote ? — Il est encore besoin d’une critique de l’idée de « but ».

361.

Le problème du comédien. — Le problème du comédien m’a le plus longtemps inquiété : j’étais dans l’incertitude (et je le suis parfois encore maintenant), au sujet de la voie qu’il faudrait suivre pour atteindre la conception dangereuse de l’ « ar-