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minutieuses sur « la valeur de nos actions » ! Oui, mes amis, il est temps de montrer son dégoût pour ce qui concerne tout le bavardage moral des uns sur les autres. Rendre des sentences morales doit nous être contraire. Laissons ce bavardage et ce mauvais goût à ceux qui n’ont rien de mieux à faire qu’à traîner le passé, sur une petite distance, à travers le temps, et qui ne représentent eux-mêmes jamais le présent, — à beaucoup donc, au plus grand nombre ! Mais nous autres, nous voulons devenir ceux que nous sommes, — les hommes uniques, incomparables, ceux qui se donnent leurs propres lois, ceux qui se créent eux-mêmes ! Et, pour ce, il faut que nous soyons de ceux qui apprennent et découvrent le mieux tout ce qui est loi et nécessité dans le monde : il faut que nous soyons physiciens, pour pouvoir être, en ce sens-là, des créateurs, — tandis que toute évaluation et tout idéal, jusqu’à ce jour, fut basé sur une méconnaissance de la physique, en contradiction avec elle. C’est pourquoi : vive la physique ! Et vive davantage encore ce qui nous contraint vers elle — notre loyauté !

336.

Avarice de la nature. — Pourquoi la nature a-t-elle été si parcimonieuse à l’égard des hommes, qu’elle ne les a pas fait luire, l’un plus, l’autre moins, selon l’abondance de leur lumière ? Pourquoi les grands hommes n’ont-ils pas, dans leur lever et