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l’ancien monde méridional n’avait pas été barbarisée peu à peu par une excessive addition de sang germanique barbare et privée ainsi de sa prépondérance. Plus un individu ou bien plus les idées d’un individu peuvent agir d’une façon générale et absolue, plus il est nécessaire que la masse sur laquelle on agit soit composée d’éléments identiques et inférieurs ; tandis que les mouvements d’opposition révèlent toujours des besoins opposés qui veulent, eux aussi, se satisfaire et se faire valoir. D’autre part on peut toujours conclure à une véritable supériorité de culture, quand des natures puissantes et dominatrices ne parviennent qu’à une influence médiocre, limitée à des sectes : il en est ainsi pour les différents arts et les domaines de la connaissance. Où l’on domine il y a des masses : où il y a des masses il y a un besoin d’esclavage. Où il y a de l’esclavage les individus sont en petit nombre, et ils ont contre eux les instincts de troupeaux et la conscience.

150.

Pour la critique des saints. — Faut-il donc, pour avoir une vertu, vouloir la posséder justement sous sa forme la plus brutale ? — telle que la désiraient les saints chrétiens, telle qu’ils en avaient besoin. Ces saints ne supportaient la vie qu’avec la pensée que l’aspect de leur vertu remplirait chacun du mépris de soi-même. Mais j’appelle brutale une vertu avec de pareils effets.