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pour pouvoir ensuite lutter avec ce monstre. Si ces êtres avides de misère sentaient en eux la force de faire du bien, en eux-mêmes, pour eux-mêmes, ils s’entendraient aussi à se créer, en eux-mêmes, une misère propre et personnelle. Leurs sensations pourraient alors être plus subtiles, et leurs satisfactions résonner comme de bonne musique ; tandis que maintenant ils remplissent le monde de leur cri de détresse et, par conséquent, trop souvent, en premier lieu de leur sentiment de détresse ! Ils ne savent rien faire d’eux-mêmes — c’est pourquoi ils crayonnent au mur la misère des autres : ils ont toujours besoin des autres ! Et toujours de nouveau d’autres autres ! — Pardonnez-moi, mes amis, j’ai osé crayonner au mur mon bonheur.