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la modestie des chrétiens qui vont à Bayreuth. Moi-même je ne supporterais pas certaines paroles dans la bouche d’un Wagner. Il y a tels concepts qui n’appartiennent pas à Bayreuth… Quoi ? Un christianisme apprêté pour des wagnériennes, peut-être par des wagnériennes ? (— car sur ses vieux jours Wagner fut tout-à-fait feminini generis.) Encore une fois : les chrétiens d’aujourd’hui me paraissent trop modestes… Si Wagner fut un chrétien, Liszt fut peut-être un père de l’Église ! — Le Besoin de Rédemption, quintessence de tous les besoins chrétiens, n’a rien à faire avec de pareils paillasses : c’est la plus loyale expression de la décadence, son affirmation la plus sincère et la plus douloureuse au moyen de symboles et de pratiques sublimes. Le chrétien veut se dégager de lui-même. « Le moi est toujours haïssable. »[1] — La morale supérieure, la morale des maîtres, a au contraire ses racines dans une triomphante affirmation du moi, — c’est une affirmation de la vie par elle-même,

  1. En français dans le texte.