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les indécis, sans qu’ils puissent saisir le pourquoi de la séduction. Avec cela Wagner est un séducteur de grand style. Il n’y a pas de fatigue spirituelle, de décrépitude, de poison mortel, de pessimisme qui n’ait trouvé dans son art quelque abri secret : — c’est l’obscurantisme le plus noir qu’il dissimule sous l’enveloppe lumineuse de l’idéal. Il flatte tous les instincts nihilistes (— bouddhistes) et les costume en musique, il flatte chaque forme de christianisme, chaque expression religieuse de la décadence. Ouvrons nos oreilles : tout ce qui a jamais poussé sur le sol de la vie appauvrie, tout le faux-monnayage de la transcendance et de l’au-delà a trouvé son plus sublime apôtre en Wagner — non pas au moyen de formules : Wagner est trop malin pour employer des formules — mais par une séduction de la sensualité qui produit d’elle-même une nouvelle fois à l’égard de l’esprit l’amollissement de la lassitude. La musique comme Circé… Sous ce rapport, son dernier ouvrage est son plus grand tour de force. Le Parsifal conservera toujours sa place dans l’art de la séduction, comme le coup de génie de la séduction…