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secondaire (— ce dernier point indispensable pour la pure insanité[1]). Quelles surprises on éprouve alors ! Le croiriez-vous, toutes les héroïnes de Wagner, sans exception, aussitôt qu’on les a dépouillées de leur épiderme héroïque ressemblent à s’y méprendre à Madame Bovary ! — comme l’on comprend à l’inverse que Flaubert était en libre position de traduire son héroïne en Scandinave ou en carthaginois et de la livrer alors, mythologisée, en façon de livret, à Wagner. Oui, tout compte fait, Wagner ne paraît pas s’être intéressé

  1. Avant Wagner, tout le monde écrivait avec raison Parcival ou Parceval, mot d’origine française (Perce-val) dont le sens est à peu près jeune étourdi. Mais Wagner, par un caprice singulier, adoptait la fausse conjecture de l’historien littéraire J. Görres, d’après laquelle le mot serait d’origine arabe Parsi-fal, littéralement pur-fou. On lit en effet, dans la prophétie à Amfortas :
    « Durch Mitleid wissend :

    der reine Thor

    harre sein, den ich erkor ! »

    (Clairvoyant à force de pitié — le pur insensé ! — espère en lui ! c’est l’élu qui te sauvera !) Der reine Thor, c’est-à-dire le pur insensé, le fou candide. Nietzsche a modernisé malicieusement l’expression wagnérienne, en faisant d’elle un substantif — désormais ironique — reine Thorheit, l’insanité pure.

    « Note des traducteurs. »