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rance de la vie refoulées dans les créations les plus infimes, — et le reste pauvre de vie. Partout la paralysie, la fatigue, l’engourdissement, ou bien l’état de guerre et le chaos : l’un et l’autre sautant toujours davantage aux yeux, si hautes que soient les formes d’organisation qu’on atteigne. La vie s’est sommairement retirée de l’ensemble : il est fabriqué, calculé, artificiel, c’est un produit d’art.

Chez Wagner se montre au début l’hallucination : non pas des accents, mais de la mimique. C’est pour la mimique qu’il recherche la sémiotique musicale. Veut-on l’admirer, il faut le voir à cet endroit de son travail : à quelles divisions il procède, comme il les anime, comme il les détache, comme il les rend sensibles. Mais par là s’épuise sa puissance : le reste ne vaut rien. Qu’il est chétif, qu’il est empêtré, qu’il est novice, son art de développement, l’effort qu’il fait pour rapiécer ce qui ne végète pas progressivement ! Sa manière fait ici songer à celle des frères de Goncourt dont le style ressemble à tant d’autres égards à celui de Wagner. On éprouve une sorte de pitié pour une si grande peine. Que Wagner