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Partout où il y a une certaine unité dans le groupement, on a toujours considéré l’esprit comme la cause de cette coordination : ce à quoi il n’y a aucune espèce de raison. Pourquoi l’idée d’un factum complexe serait-elle une des conditions de ce factum ? ou bien pourquoi un factum complexe serait-il précédé de la représentation de celui-ci ?

Nous nous garderons bien d’expliquer la finalité par l’esprit : il n’y a aucune raison pour attribuer à l’esprit la particularité d’organiser et de systématiser. Le système nerveux possède un domaine beaucoup plus étendu, le monde de la conscience est surajouté. Dans le processus général de l’adaptation et de la systématisation la conscience ne joue pas de rôle.

Rien n’est plus erroné que de faire des phénomènes psychiques et physiques les deux visages, les deux révélations d’une même substance. Par là on n’explique rien ; l’idée de « substance » est absolument inutilisable lorsque l’on veut expliquer. La conscience qui joue le deuxième rôle, indifférente presque, superflue, destinée peut-être à disparaître et à faire place à un automatisme complet…

Si nous n’observons que les phénomènes intérieurs, nous sommes comparables aux sourds-muets qui devinent les mots qu’ils n’entendent pas, d’après le mouvement des lèvres. Nous concluons des appa-