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la sénilité qui se sont mis à gangrener l’Europe, à se croire un être relativement robuste, au moins encore apte à vivre et à affirmer la vie…

12.

— Je ne puis ici étouffer un soupir et refouler un dernier espoir. Qu’est-ce donc qui m’est tout à fait insupportable, particulièrement à moi ? De quoi ne puis-je absolument pas venir à bout ? Qu’est-ce qui me suffoque et m’abat ? Air vicié ! air vicié ! Quelque chose de mal venu s’approche de moi ; faut-il que je respire les entrailles d’une âme manquée ?… Que ne supporte-t-on pas en fait de misères ; de privations, d’intempéries, d’infirmités, de soucis et d’isolements ? Au fond, nous pouvons venir à bout de tout cela, tels que nous sommes, nés pour une existence souterraine, pour une vie de combat ; on finit toujours par revenir à la lumière, l’on a toujours son heure dorée de victoire, — et l’on se dresse alors, tel qu’on est né, infrangible, l’esprit tendu, prêt à atteindre des buts nouveaux, des buts plus difficiles, plus lointains, tendu comme un arc que l’effort ne fait que tendre davantage. — Mais de temps en temps accordez-moi — si du moins vous existez, par-delà le bien et le mal,