Page:Nietzsche - La Généalogie de la morale.djvu/48

Cette page a été validée par deux contributeurs.

che pourront même dès aujourd’hui se ralentir toujours davantage, devenir toujours plus délicates, plus imperceptibles, plus réfléchies — on a du temps devant soi… L’Église a-t-elle encore dans cette sphère une tâche nécessaire à remplir ? a-t-elle, d’une façon générale, encore un droit à l’existence ? Ou bien pourrait-on s’en passer ? Quæritur. Il semble qu’elle entrave et retarde cette marche plutôt que de l’accélérer ? Eh bien ! voilà qui pourrait constituer précisément son utilité… Assurément, elle a quelque chose de grossier et de rustique qui répugne à une intelligence un peu délicate et à un goût vraiment moderne. Ne devrait-elle pas, pour le moins, gagner un peu en raffinement ?… Elle repousse aujourd’hui plus qu’elle ne séduit… Qui de nous voudrait être libre penseur si l’Église n’existait pas ? L’Église nous répugne, mais non pas son poison… Mettez de côté l’Église, et nous aimerons aussi le poison… » — Tel fut l’épilogue que fit à mon discours un « libre penseur », un honnête animal, comme il l’a surabondamment prouvé, et de plus un démocrate ; il m’avait écouté jusque-là, mais il ne put pas supporter mon silence. Or, en cet endroit j’ai beaucoup de choses à taire. —