Page:Nietzsche - La Généalogie de la morale.djvu/265

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’aveuglement, le mensonge, — si Dieu lui-même se trouvait être notre mensonge, un mensonge qui a le plus duré ? — Il convient ici de faire une pause et de méditer longuement. La science elle-même a besoin désormais d’une justification (ce qui ne veut même pas dire qu’il en existe une pour elle). Interrogez sur ce point les philosophies les plus anciennes et les plus récentes : il n’en est point qui ait conscience que la volonté de vérité elle-même puisse avoir besoin d’une justification ; il y a là une lacune dans toutes les philosophies. — D’où cela vient-il ? C’est que jusqu’ici l’idéal ascétique a dominé toutes les philosophies, que la vérité a toujours été posée comme essence, comme Dieu, comme instance suprême, que la vérité ne devait pas être envisagée comme problème. Comprend-on ce « devait » ? — Depuis le moment où la foi dans le Dieu de l’idéal ascétique a été nié, il se pose aussi un nouveau problème : celui de la valeur de la vérité. — La volonté de vérité a besoin d’une critique — définissons ainsi notre propre tâche —, il faut essayer une bonne fois de mettre en question la valeur de la vérité… (Celui qui trouvera ces indications trop succinctes pourra relire le paragraphe du Gai Savoir qui porte le titre : « Dans