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cette tranquillité enfin obtenue, voilà toujours à leurs yeux le mystère par excellence qu’aucun symbole, pour sublime qu’il soit, ne peut exprimer, c’est le retour béni à l’essence des choses, c’est la libération de toute erreur, c’est la « science », c’est la « vérité », c’est l’ « être », c’est la délivrance de tous les buts, de tous les désirs, de toute activité, c’est aussi un état par-delà le bien et le mal. « Le bien et le mal, dit le bouddhiste, — l’un et l’autre sont des entraves : l’homme parfait se rend maître de l’un et de l’autre »… « L’action et l’omission, dit le croyant des Vedânta, ne lui cause aucune douleur ; en vrai sage il secoue loin de lui le bien et le mal ; aucun fait ne trouble plus son royaume ; le bien et le mal, il les a franchis tous deux » : — c’est là, en somme, une conception entièrement indienne, tant brahmanique que bouddhique. (Ni la pensée indienne, ni la pensée chrétienne n’estiment que la suprême délivrance soit accessible à la vertu, à l’amélioration morale, si haut qu’elle place d’ailleurs la valeur hypnotique de la vertu qu’on retienne bien ce point, — il correspond simplement à un fait. Être demeuré vrai en cette occasion, voilà qui peut être considéré comme un des meilleurs morceaux de réalisme