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force, de vigueur de la vie animale : la plus grande force absorbe alors la plus petite. — On peut d’ailleurs s’expliquer, d’après cette interprétation, le cas de Schopenhauer dont j’ai déjà parlé : l’aspect de la beauté agissait évidemment chez lui comme une irritation sur la force principale de sa nature (la force de réflexion et la pénétration du regard) ; cette force faisant explosion se rendait, d’un seul coup, maîtresse de ta conscience. Cela n’exclut absolument pas la possibilité de voir cette douceur particulière et cette plénitude qui sont le propre de la condition esthétique prendre son origine dans l’ingrédient « sensualité » (source aussi de cet idéalisme propre aux jeunes filles nubiles). — Ainsi la sensualité ne serait pas supprimée dès que se manifeste la condition esthétique, comme c’était l’opinion de Schopenhauer, mais seulement transfigurée de manière à ne plus apparaître dans la conscience comme excitation sexuelle. (Je reviendrai une autre fois sur ce point, en parlant de problèmes plus délicats encore qui rentrent dans ce domaine si inexploré et si obscur, le domaine de la Physiologie de l’Esthétique.)