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de Diane — fut plus digne de lui : j’en conviens : pourquoi manquons-nous de pareils temples ? (— peut-être cependant ne nous manquent-ils pas : je pense à l’instant à ma plus belle chambre de travail de la piazza di San Marco, à condition que ce soit le printemps et le matin entre dix heures et midi). Mais ce qu’Héraclite voulait éviter, c’est ce que nous, nous aussi, nous voulons éviter encore : le bruit et le bavardage démocratique des Éphésiens, leur politique, les nouvelles qu’ils apportent de l’« Empire » (je veux dire la Perse, on m’entend — ), leur pacotille d’ « aujourd’hui », — car nous autres philosophes nous avons surtout besoin d’un repos, le repos des choses d’ « aujourd’hui ». Nous vénérons ce qui est tranquille, froid, noble, lointain, passé, toute chose enfin dont l’aspect ne force pas l’âme à se défendre et à se garer, — toute chose à qui l’on peut parler sans élever la voix. Qu’on écoute seulement le timbre que prend la voix d’un esprit quand il parle : chaque esprit a son timbre et l’affectionne. Voyez celui-ci, par exemple, ce doit être un agitateur, c’est-à-dire une tête creuse, une casserole vide : tout ce qui y entre en ressort assourdi, enflé, alourdi par l’écho du grand vide. Cet autre parle presque toujours d’une voix enrouée : s’est-il