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pour les cyniques de l’Antiquité, un baume, un délassement, sa rançon et son remède contre le dégoût, son bonheur. Ceci suffira pour expliquer le côté le plus personnel du cas de Schopenhauer ; mais il y a en lui autre chose qui est typique et ceci nous ramène à notre problème. Incontestablement, depuis qu’il y a des philosophes sur terre et partout où il y a des philosophes (de l’Inde à l’Angleterre, pour prendre les pôles opposés dans les capacités philosophiques), il y a une véritable animosité, une rancune philosophique à l’égard de la sensualité. — Schopenhauer n’en est que l’explosion la plus éloquente et, pour qui sait l’apprécier, la plus entraînante, la plus enchanteresse ; — il existe de même une véritable prévention, une tendresse toute particulière des philosophes à l’égard de l’idéal ascétique — à ce sujet point d’illusion possible. L’une et l’autre particularité, je le répète, appartiennent au type ; si toutes deux manquent chez un philosophe, celui-là — soyez-en certain — ne sera jamais qu’un « prétendu » philosophe. Qu’est-ce que cela signifie ? Car il faut d’abord interpréter cet état de choses : en soi c’est un fait qui demeure stupide pour l’éternité, comme c’est le cas pour toute « chose en soi ». Toute bête, la bête philosophique comme les autres,