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nous vient aussitôt le souvenir de la meilleure époque que connut peut-être la vie de Wagner, de l’époque la plus forte, la plus gaie et la plus courageuse : c’était lorsque le préoccupait l’idée profonde des « Noces de Luther ». Qui sait quel hasard nous a valu, au lieu de cette musique nuptiale, celle des Maîtres Chanteurs ! Et dans celle-ci que d’échos peut-être de celle-là ? Du moins n’y a-t-il point de doute que dans ces « Noces de Luther » il ne se fût agi également d’un éloge de la chasteté. Et aussi, il est vrai d’un éloge de la sensualité : — cela me semble tout à fait juste et ce l’eût été aussi au point de vue « wagnérien ». Car entre la chasteté et la sensualité il n’y a pas nécessairement opposition ; tout bon mariage, toute sérieuse passion du cœur est au-dessus de cette opposition. Wagner, à mon sens, aurait bien fait de remettre à l’esprit de ses Allemands cette agréable vérité, à l’aide d’une comédie gracieuse et hardie, qui aurait représenté l’histoire de Luther, car, parmi les Allemands, il y a eu toujours beaucoup de calomniateurs de la sensualité ; et le mérite de Luther ne fut peut-être en rien plus grand que lorsqu’il eut le courage de sa sensualité (on disait alors, non sans douceur, la « liberté évangélique »…). Pourtant, même dans le