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tation de la perspicacité, dans un développement de la mémoire, dans la volonté d’agir dorénavant avec plus de prudence, de précaution, de mystère, dans la constatation qu’en beaucoup d’affaires on est décidément trop faible, dans une espèce de réforme du jugement qu’on porte sur soi-même. Ce que l’on atteint, en somme, par le châtiment chez l’homme et chez l’animal, c’est l’augmentation de la crainte, l’affinement de la perspicacité, la domination sur les appétits : en ce sens le châtiment dompte l’homme, mais ne le rend pas « meilleur » ; — on pourrait, avec plus de raison, prétendre le contraire (« Dommage rend sage, » dit le peuple : mais dans la mesure qu’il rend sage il rend mauvais. Par bonheur, il arrive assez souvent qu’il rend stupide.)

16.

Arrivé à ce point, je ne puis plus me dérober à la nécessité de donner à ma propre hypothèse sur l’origine de la « mauvaise conscience » une première expression toute provisoire : elle n’est pas aisée à faire entendre et veut être longuement méditée, surveillée, ruminée. Je considère la mauvaise conscience comme le profond état morbide où l’homme