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L’ORIGINE DE LA TRAGÉDIE

glorieuse de la tragédie attique et du dithyrambe dramatique, comme l’aboutissement de ces deux instincts, dont l’union mystérieuse, après un long antagonisme, se manifesta dans la splendeur d’un tel rejeton, — qui est à la fois et Antigone et Cassandre.

5.

Nous nous rapprochons maintenant du véritable objectif de nos recherches, qui est de connaître et de pénétrer le génie et l’œuvre d’art dionyso-apolliniens, ou tout au moins de pressentir la nature de cet agrégat mystérieux. Ici il faut nous demander d’abord en quel lieu du monde hellénique apparut pour la première fois ce germe nouveau, dont l’évolution nous conduit jusqu’à la tragédie et au dithyrambe dramatique. L’antiquité elle-même s’est chargée de nous répondre symboliquement, en figurant côte à côte, sur ses gemmes, pierres gravées, etc., Homère et Archiloque comme les premiers ancêtres et flambeaux de la poésie grecque, dans la conviction profonde que, seules, ces deux natures également et absolument originales doivent être considérées comme la source du torrent de feu qui se répandit ensuite sur tout le monde grec. Homère, le vieillard rêveur et perdu dans ses pensées, le type de l’artiste naïf, apollinien, contemple avec étonnement le visage passionné du belliqueux serviteur des muses Archilo-